Histoire de pont (Acte 2) Remise en état des dessous de la 11B

Mai 2021
La voiture étant bien en place sur son pont de bois, le travail peut commencer.

Démontage de tout ce qui peut se démonter, échappement, circuits d'essence et de freins ,tirant
d'essieu etc, et remise en état immédiate et systématique de chacun des éléments.

L'échappement Inox a  plus de 30 ans et 100000 Kms

Pendant la fabrication du pont en bois, l'embase du bouchon du réservoir d'essence a  été
ressoudée par le spécialiste et le réservoir réparé est revenu par la même navette, pendant le
confinement.
Bonne nouvelle il est en excellent état général, sans aucune oxydation intérieure.

S'en suivront le décapage et la mise en peinture avant remontage.
L'embase du bouchon de vidange ressoudée à l'étain.

Des criques sont apparues sur le silencieux d'échappement, dues aux vibrations, quelques
soudures et un renfort vont y remédier, plus un brossage en règle pour redonner de l'éclat.

Le collier support de tube de sortie d'échappement, que j'avais confectionné en inox a  bien
vieilli, un coup de brosse et s'est reparti pour plusieurs décennies.

Le tirant d'essieu est entiérement décapé avant d'être repeint.

Les silentblocs sont de 1950, j'en profite pour les changer.
Le problème a  été de trouver le bon fournisseur, celui qui proposait les pièces au plus près de
l'origine et avec une matière de qualité.

L'état des lieux après la dernière remise en état, il y a plus de 40 ans, laisse voir quelques
traces de corrosion, exemple la partie sous le plancher au niveau du conducteur.

Après nettoyage à  l'essence des dessous et enlèvement de la couche de gras, le décapage
peut commencer.

Décapage au couteau de peintre, la tôle commence à  apparaître.
Le ponçage et le brossage débutent.

Travail intense avec différentes brosses métalliques sur meuleuse et perçeuse, plusieurs jours
seront nécessaires.
Inévitablement la réalité de la corrosion se précise.

Le reste du plancher est comme neuf.

Par contre l'extrémité du profilé en V à  l'arrière est aussi touchée par la corrosion, alors que la
tôle parraîssait saine.
L'option finale, après réflexion, est de remplacer uniquement les parties de tôle oxydées, en
purgeant le minimum de tôle.
La cornière en V refabriquée, que j'ai commandé ne pourra pas être employée, même
partiellement car ses pliages ne respectent pas le profil d'origine.

Mise en peinture de la partie arrière et du dessous de plancher, sauf les parties corrodées.

Purge de la partie avant, étonnamment il n'y a aucune protection dans les zones de contact, la
tôle d'origine n'est pas attaquée par la rouille, au moins dans les zones ou l'humidité ne stagne
pas.

Purge de la partie arrière.

Examen des dégâts côté intérieur, la thibaude mise en place lors de la restauration a conservé
l'humidité, qui au fur et à  mesure des années a fait des dégâts, malgré les sèchages répétés,
après avoir enlevé le tapis caoutchouc, la corrosion au final est importante.

Enlévement de la thibaude au couteau de peintre.

Ponçage du plancher avant, les parties rouillées sont en creux, cela délimite la zone à  changer.
Petite précision, lors de la restauration de la 11, le plancher n'avait aucune trace de corrosion,
juste quelques points de rouille, un brossage, puis peinture d'apprêt et deux couches de finition
de l'intérieur de la coque avaient été réalisées.

Après concertation avec un ami professeur technique, qui restaure une Trac et qui a changé un
petit morceau de son plancher, il a été décidé de refabriquer le morceau de plancher avec ses
nervures, au plus proche possible de l'origine.
J'ai constaté que les planchers refabriqués ne respectaient pas les côtes d'origine, et comme je
dois n'en remplacer qu'une partie, il faut que le morceau neuf se marie au mieux avec le
plancher existant.
Un petit croquis pour poser les côtes de la matrice, des tôles récupérées, la fabrication peut
commencer avec l'aide de mon ami.

Matrice en deux parties, mâle et femelle, pointage des pièces et soudure.

La matrice terminée avec sa butée réglable, essai d'emboutissage à l'étau sur un échantillon.

Présentation sur et sous le plancher pour validation du profil, on ne pourra pas faire beaucoup mieux.

Mise en place de la matrice avec adaptation, sur une plieuse ancienne de 100 tonnes dans une
entreprise locale de métallerie, réalisation du premier embouti, la butée de la seconde nervure
est déjà  réglée.
La reflexion portait sur la rétractation en longueur de la tôle après chaque emboutissage pour
respecter le pas de 120 mm entre deux nervures.
Après mes essais à l'étau, et à  ma grande stupéfaction, cette rétractation n'exèdait pas 0,8 mm,
ce qui m'a permis de positionner la butée en tenant compte de cette côte, pour chaque
emboutissage.

Deuxième emboutissage

Troisième embouti, après déplacement et réglage de la butée, en tenant compte de la rétreinte.

Le morceau de plancher refabriqué, cela paraît simple au final, c'est le résultat d'une reflexion
intense, collective, en exploitant les connaissances et l'expérience de chacun.
Tout cela pour un prix très modique, et un process de fabrication de la pièce simple et rapide.
J'avais pris la précaution de réaliser deux pièces, en suivant, pour ne pas avoir à  recommencer
depuis le début, au cas ou les hypothèses ne correspondraient pas à la réalité.

Présentation sur le plancher, les côtes sont respectées.

Fabrication des morceaux de cornière avec le bon arrondi.
Soudage d'un fer rond en bout d'un montage sur la plieuse, et pliage à  vue.

La pièce refabriquée ( à  gauche ) d'un fournisseur de pièces de Traction n'est pas conforme, car
pliée et non emboutie.
On voit bien la différence avec la superposition d'un morceau issu de la voiture.
A droite le morceau de cornière embouti, conforme au profil d'origine.

Ajustage des deux morceaux de cornière sur la voiture, arrière et avant.

Dépointage de la zone du plancher corrodé.

Découpe de la partie corrodée, en préservant le restant du renfort de plancher en V.

Ajustage du morceau de plancher, il ne reste plus qu'à  tout souder.

Remontage de tous les accessoires sous la voiture, réservoir d'essence, échappement, câbles
de frein à  main, circuits de freinage et d'essence temporaires, pour permettre d'emmener la
Traction chez le carrossier par ses propres moyens.

Pour se faire j'utilise le renfort central en V au lieu de celui de gauche pour passer les
canalisations, donc je suis obligé de prolonger les deux tuyaux de freins et d'essence devenus
trop courts, avec des pièces en stock,

J'en profite pour changer les deux flexibles de freins arrières de 135 mm, du bon modèle tant
qu'à faire, de la pièce neuve d'époque DBA, made in France.

Traitement des surfaces de tôle en contact, avant soudure avec un spray cuivré.
Dépôt d'une couche de cuivre qui servira d'anticorrosion et facilitera les opération de soudage
en améliorant la conductivité.

Après près de 4 mois d'attente, et d'arrêt forcé, causés par les deux premiers carrossiers que
j'avais contacté, ils ne se sont pas manifestés malgré plusieurs relances, le troisième a réagit
rapidement et a effectué toutes les soudures, du bon travail.

De retour à  l'atelier et de nouveau sur son pont de bois, meûlage des soudures.

Cela commence à ressembler à  un plancher de Traction en voie de guérison.

Une couche d'apprêt et deux couches de peinture carrosserie avec durcisseur sur le plancher.

Fin de la peinture du dessous du plancher, 4 couches de Primair Owatrol AP 60 à  base de
rustol.

Projection d'un anti-gravillons sous le plancher, remontage des câbles, tube d'échappement et
nouvelles tuyauteries dans le renfort sous plancher gauche, maintenant exempt de corrosion,
c'est reparti pour de nombreuses années.

Conclusion :
La corrosion peut s'inviter et se développer très vite, même sur un véhicule restauré depuis la
coque nue.
Quand on attaque une opération de ce genre, on sait quand on commence, il peut y avoir des
aléas en cours de route, donc il vaut mieux ne pas définir une date de fin trop ambitieuse,
surtout quand à  un moment du process on dépend d'un tiers, et là , on ne maîtrise très vite plus
rien du tout.
Carrossier c'est un métier, je m'en était rendu compte lors de la restauration il y a bientôt 40
ans, par contre avec du temps, de la reflexion, une aide technique et quelques outils l'on peut
se lancer dans une réfection de tôlerie simple.
Mon handicap, c'est de ne pas maîtriser la soudure.
10 mois de chantier, avec une grosse interruption, et un coût final de 390 Euros environ pour les
fournitures et l'intervention des deux pros.